• Coup de gueule perso

     À Patrick Bruel et La Fouine ainsi qu'à l'association e-enfance,

    Voici l'avis d'une ancienne élève harcelée comme les journalistes nous appellent maintenant sur le clip de la chanson Maux d'enfants.

     

    Je voudrais d'abord signaler que malgré le fait que le tube Alors regarde ait 25 ans, les humains ne veulent toujours pas voir ce qu'il se passe autour d'eux.

    Tout le monde fait comme si le phénomène était nouveau, comme si c'était une conséquence du Web, mais on oubli trop souvent que depuis la nuit des temps, il n'y a pas plus méchant qu'un enfant. Dans ses Souvenirs d'enfance, Marcel Pagnol racontait déjà ce que les enfants du début du XXe siècle se faisaient entre eux.

    Personnellement, mon enfer a commencé à même pas 6 ans, quand mes parents ont déménagé en pleine campagne, dans un coin de France où l'on déteste les « Parigots ». Dès le début, la fille populaire de l'école soutenue par toute la classe sans exception m'a forcé à embrasser un type que je connaissait à peine à l'époque et qui avait au moins aussi peur que moi. Et lorsque mes parents l'on apprit, ils m'ont engueulée : « On n'embrasse pas les garçons, c'est pas propre ». Apparemment aucun d'eux ne connaissait le poids des autres, et de la peur, dans les décisions à prendre.

    Deux ans après, la maitresse elle-même a fait en sorte que mes camarades me détestent encore plus. Ensuite, j'ai faillit me faire tabasser par une nouvelle-arrivée qui voulait simplement s'intégrer au groupe. L'instituteur n'est pas intervenu, pour voir si j'étais capable de me défendre moi-même. J'en ai été capable. Puis se fut le collège qui fut les pires années de ma vie. Imaginez 500 personnes qui ne vous supportent juste parce que vous êtes différent ? Mais comment aurais-je pu être normale avec ce que j'avais déjà vécut ?

    Dans votre clip et sur le site de l'association, vous dites qu'il faut parler. Belle idée d'utopiste et d'ignorant. Vous penser vraiment, que l'on y a pas pensé avant ? J'en ai parler en sixième. D'abord aux pions, qui considérait que ce n'était pas aux autres de ne plus être violent mais à moi de changer et de rentrer dans le moule. Puis à ma mère, qui a considéré que j'exagérais et qu'il fallait que j'apprenne à être plus forte. En effet, aujourd'hui, je suis beaucoup plus forte, mais en retour je me retrouve être incapable de faire confiance à qui que se soit.

    Le collège est devenu un enfer où il fallait que j'aille tous les jours. À plusieurs reprises j'ai pensé à me suicider, et au dernier moment je me disais que ça leur ferait trop plaisir. Et ne venez pas me dire que c'est faux, que personne ne peut vouloir la mort de quelqu'un à même pas 15 ans, car dans ce collège il y avait en général un mort tous les quatre ans, et tout le monde avait parié sur moi. Ils ont mal jugé de ma force. Les profs ont pour la plupart toujours fait semblant de ne rien voir et le CPE était trop occupé avec des histoires plus graves que les miennes. Alors, ensuite j'ai eu envie de tuer, puis de torturer tout le monde. Mais, en quoi cela aurait changé quelque chose ?

     

    Alors, votre clip, il part d'un bon sentiment, mais désolé de vous le dire, il ne fera pas changer grand chose. La différence personne n'en veux en France. Soit on est dans le moule, soit on ne l'est pas. Et moi, et tout ceux dans mon cas, ne le sommes pas. On n'a pas forcément honte de nous pour autant, même si parfois la force de vivre nous lâche, et je continue de penser que ce n'est pas à nous de changer, mais ce n'est pas en 2014 que le monde changera.

     

     Pour voir le clip : https://www.youtube.com/watch?v=YBubRfFUsNA

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 11 Juin 2015 à 10:44

    Je suis d'accord et pas avec toi. Tu as usé de malchance. Si mon gamin vient me dire que ça ne va pas, et c'est arrivé, je l'aide, je ne lui dit pas débrouille-toi. Ensuite, en tant qu'instit, je suis effarée de ce que tu racontes. Jamais je ne laisserais ce genre de choses arriver dans ma classe. Mais je sais que les enfants sont durs. Au collège, j'ai passé une année à l'écart (pas seule, nous étions deux), car j'étais copine avec une noire. Une autre année seule parce que je ne m'habillais pas chez Pinkie. Lors d'un séjour linguistique, j'étais l'extra-terrestre parce que j'habitais au Cameroun. C'est peut-être pour ça, qu'aujourd'hui, je ne peux laisser faire.

    2
    Jeudi 11 Juin 2015 à 13:04

    Mon parcours n'est pas si particulier que ça. il est simplement spécifique à la campagne. Il suffit de lire les paroles de la chanson de Kamini (Marly-Gommont) pour comprendre qu'il a vécut à peu près la même chose. Dans nos chers espaces ruraux, il suffit d'être différent pour subir des injustices.

    Actuellement, je suis enseignante dans un lycée et dernièrement j'ai pu me rendre compte que les choses n'ont pas tellement changées. Lors du dernier conseil de classe d'une de mes classes de seconde, j'ai signalé le fait que deux des élèves étaient les bouc-émissaires des autres et leur prof principal m'a fait comprendre qu'ils n'avaient qu'à être dans la norme (c'est-à-dire en l’occurrence, moins jouer aux jeux vidéos) pour obtenir le respect des autres.

    Donc je reconnais que j'y suis allée un peu fort, d'autant plus que Patrick Bruel a reconnu lui-même à la radio qu'il a découvert des situations qu'il était loin d'imaginé et je m'excuse auprès de lui d'avoir publié ce texte aussi rapidement ; mais je continue de penser que contrairement à ce qui est dit dans les médias, l’Éducation Nationale et la société plus généralement, ne fait rien pour endiguer la violence scolaire.

    Les enseignants qui comme toi et moi dénoncent ces faits sont encore aujourd'hui des exceptions.

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    3
    Jeudi 11 Juin 2015 à 13:15

    Tu n'as pas à t'excuser, c'est ton ressenti. Et je sais que dans nos classes, les enfants ne sont pas tendres. J'interviens au mieux que je peux, je ne laisse pas faire mais je n'y arrive pas tout le temps. Comme je te disais, je l'ai vécu donc je n'aime pas que d'autres vivent ce que j'ai vécu de mal. Je pense que tant qu'on ne sait pas, on n'imagine pas. j'ai encore fait la morale à mon plus jeune (11 ans) il y a peu car il critiquait un enfant (que j'ai eu dans ma classe donc que je connais). Je lui ai dit que s'il avait des copains, s'il n'était pas laissé de côté, il serait peut-être moins embêtant et moins "violent". Mais mon fils m'a répondu que s'il était copain avec lui, il risquait de perdre tous les autres copains. Que répondre ?

    4
    Jeudi 11 Juin 2015 à 13:28

    En effet, il est parfois dure de répondre. Mais apparemment ton fils n'a pas de problèmes à se faire des amis, il peut dans un premier temps leur demander d'arrêter d'embêter ton ancien élève, ce sera déjà un grand pas en avant. En outre, les personnes violentes n'ont pas toujours pleine conscience de leur acte et parfois, il suffit de leur dire simplement de se calmer pour qu'ils arrêtent. Et il ne faut pas que ton fils oublie que l'autre pensera certainement que son aide est hypocrite.

    Il peut aussi en parler à un de ses profs. Si le message vient d'un élève "normal", il passera peut-être mieux.

    Enfin, et c'est le plus important, il ne faut surtout pas le provoquer gratuitement.

    (Bien sur ce ne sont que des conseils, venant de quelqu'un qui n'a pas d'enfant).

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